Quelle est la genèse de votre projet ?
Ce projet est né aux premières heures du confinement, d’un double désir de mieux comprendre la dynamique de l’épidémie de COVID-19 en France et d’appliquer nos compétences en science des données à cette situation exceptionnelle.
Depuis plusieurs années, l’équipe-projet Sistm travaille sur des modèles dynamiques intra et inter-hôtes appliqués aux maladies infectieuses pour aider et accélérer le développement de traitement et de vaccins. C’est donc naturellement que l’idée d’un projet collaboratif utilisant les données publiques (dans un premier temps) de la dynamique épidémique de COVID-19 est née. L’idée initiale était d’arriver à prédire dès les premières semaines l’impact du confinement à moyen terme et le taux d’attaque de l’épidémie dans le but d’aider à guider un déconfinement et de comparer les résultats avec ceux obtenus par d’autres groupes de recherche en France et à l’étranger. En effet, les modèles d’épidémie reposent sur de nombreuses hypothèses, il nous semblait donc crucial de comparer les résultats de plusieurs modélisations (modèles structurels, approches statistiques…) afin de mesurer la robustesse des prédictions.
Le projet a ensuite pris de l’ampleur avec la participation de notre groupe de travail au GT1 du Health data hub : « Gestion de l’épidémie, confinement et dé-confinement » en lien direct avec les ministères.
En parallèle, notre groupe de recherche autour du projet GestEpid a été rejoint par des membres d’autres équipes Inria (Monc, Medisim, SED) et par des chercheurs de l’entrepôt de données du CHU de Bordeaux. L’équipe ainsi renforcée, s’est attaquée à un objectif encore plus ambitieux : prédire précocement une (possible) seconde vague de COVID-19 en France et en particulier en région Nouvelle-Aquitaine.
Comment se développe-t-il aujourd'hui et quels sont ses objectifs ?
Le projet a reçu le label « Mission Covid » d’Inria au début du mois d’avril 2020. Un premier article de recherche a été soumis mi-mai dans un journal en biostatistiques : nous y montrons l’effet hebdomadaire du confinement sur la dynamique épidémique du COVID-19. Nos travaux ont été mentionnés par le conseil scientifique dans leur rapport du 2 juin.
Aujourd’hui, nous portons une attention particulière au territoire de la Nouvelle-Aquitaine. Nous nous concentrons sur l’estimation et la surveillance de taux de reproduction de l’épidémie, en conciliant les diverses séries de données disponibles. Nos relations étroites avec l’entrepôt de données du CHU de Bordeaux (en phase d’extension vers les CHU de Limoges et Poitiers) nous permettent de prendre en compte des données très précoces dans la dynamique épidémique telles que les données du SAMU ou les données de surveillance du réseau sentinelle. Le travail principal est de modéliser conjointement l’ensemble des indicateurs disponibles. Nous sommes en phase de construction d’un tableau de bord permettant de suivre de manière hebdomadaire la propagation de l’épidémie et les besoins à 7 et 15 jours en capacités hospitalières dans les départements de Nouvelle-Aquitaine.
Comment travaillez-vous avec vos partenaires ?
Notre travail est en lien direct avec les partenaires locaux comme l’Inserm, l’université de Bordeaux et le CHU de Bordeaux. Des réunions pluri-hebdomadaires ont lieu en visioconférence avec les membres du projet dans le but de coordonner au mieux l’avancement.
Afin d’informer le plus rapidement possible les décideurs de santé, nous tissons aussi des liens directs avec les institutions locales (CIRE, ARS, Santé Publique France antenne région) et des acteurs au niveau national via la plateforme modcov et le Health Data Hub.