Modélisation et Simulation

Inondations en ville : comment les anticiper en regardant les océans ?

Date:
Mis à jour le 02/10/2024
Comment ce qui se passe en mer impacte les inondations en ville ? Dans une thèse co-encadrée par Antoine Rousseau (équipe-projet LEMON) et Maria Kazolea (équipe-projet CARDAMOM), José Galaz s’est attelé à faire dialoguer système aquatique marin et système hydraulique terrestre. Le but : mieux modéliser une inondation d’origine marine.
inondations en ville
© Inria / Photo H.Raguet

 

Des vents forts (jusqu’à 140 km/h), une forte dépression, un coefficient de marée élevé…. Dans la nuit du 26 au 27 février 2010, un important phénomène de submersion marine dû à la tempête Xynthia touchait la petite ville de la Faute-sur-Mer et ses alentours. La petite ville côtière qui est entourée par l’Atlantique d’un côté et la rivière du Lay de l’autre, s’est trouvée piégée par l’eau, entrainant la mort de 47 personnes et de lourds dégâts matériels.

Un évènement qui pourrait être mieux anticipé à l’avenir grâce aux travaux de recherche de certains scientifiques. C’est par exemple le cas des recherches menées par José Galaz, fondateur du TsunamiLab, dans le cadre d’une thèse récemment co-encadrée par Antoine Rousseau (équipe-projet LEMON) et Maria Kazolea (équipe-projet CARDAMOM). 

Pouvoir mieux modéliser une inondation d’origine marine

Cette thèse récemment soutenue avait ainsi pour objectif d’étudier le couplage entre des phénomènes côtiers marins (Tsunamis, tempêtes, vagues, etc…) et les inondations dans les villes côtières. Il s’agit de comprendre comment la submersion se propage depuis une vague vers la ville. Le but : combler un manque, dans la littérature, entre la simulation des tsunamis à très grande échelle ou la modélisation des vagues en zone côtière, et la simulation des inondations dans des villes proches de la mer. 

Les modèles physiques qui régissent l’écoulement de l’eau sont en effets différents entre l’océan et l’eau en ville, ils ne répondent pas aux mêmes équations. Ils ne parlent, en d’autres mots, pas la même langue. Il faut donc faire dialoguer ces modèles à l’interface, c’est-à-dire sur la côte entre la mer et la ville. Le travail de thèse de José, financé dans le cadre du défi Inria SURF, a ainsi consisté à construire des outils mathématiques et numériques pour assurer ce couplage. 

Améliorer, à terme, la gestion du risque inondation dans les villes côtières

« Nous savons modéliser avec beaucoup de précision la propagation d’un tsunami dans l’océan, avec la hauteur de vague, la vitesse de propagation, ou encore la quantité d’eau transportée, mais une fois que le tsunami arrive sur la plage, la modélisation s’arrête car nous ne sommes pas encore capables de simuler la suite de l’évènement. C’est-à-dire que les scientifiques qui travaillent sur ces domaines (tsunamis d’un côté, inondations urbaines de l’autre) ne sont pas encore capables de bien faire communiquer leurs modèles. D’où l’intérêt de permettre ce dialogue », explique Antoine Rousseau, responsable de l’équipe-projet LEMON. 

Plus concrètement, le travail de José Galaz a été consacré au développement d’un « opérateur mathématique », une sorte de « traducteur », à l’interface de deux modèles de mer et de ville simplifiés au sens de la géométrie (en une seule dimension), afin de passer les informations de l’un à l’autre, en expliquant à l’un ce que dit l’autre, et vice-versa. 

Grâce à son travail, l’eau peut donc s’écouler (mathématiquement) du grand large vers la côte, puis de la côte dans la ville. Une thèse vouée à avoir un impact, de façon certaine, sur les sciences océaniques côtières et sur la gestion du risque inondation en milieu côtier. À terme, cela permettra de développer des outils d’anticipation et d’aide à la décision pour des centres de gestion de crise (pompiers, préfecture, etc). 

Un travail au cœur du programme SURF

Ce travail théorique, que José Galaz a mis en pratique en proposant un algorithme de résolution de problème, est essentiel pour permettre des couplages entre des logiciels produits par Inria qui ont des fonctionnalités différentes, comme SW2D (LEMON, simulation des inondations) et UHAINA (CARDAMOM + partenaires, océano côtière).

La thèse de José a par ailleurs été financée par le programme SURF, dont l’objectif était de faire fonctionner ensemble différents modèles d’océan comme le classique modèle global Nemo, créé par un consortium de pays européens, ou le nouveau modèle Croco (Coastal and regional ocean community), qui fonctionne à une échelle régionale pour étudier l’océan côtier. Un défi scientifique, puisque chaque logiciel répond à une demande particulière, et qui nécessite d’étudier comment faire dialoguer ces modèles afin de pouvoir éventuellement les intégrer à une future plateforme commune.